Le Dominiquin, Dieu réprimandant Adam et Eve, vers 1623-1624

Petite introduction à cette oeuvre

Cette oeuvre a appartenu au jardinier du roi Le Nôtre avant de rejoindre les collections royales en 1693.

C'est en visitant le musée de Grenoble que je me suis arrêtée devant ce tableau du fameux peintre Domenico Zampieri, dit Le Dominiquin, et je l'ai trouvé plutôt amusant.

On y voit pleins de détails intéressants dont je voudrais vous faire part.

Le Dominiquin, Dieu réprimant Adam et Eve, vers 1623-25, huile sur cuivre, 95 x 65 cm, musée de Grenoble

De quoi s'agit-il ?

Adam et Eve ont commis le péché originel: tentés par le démon qui a pris l'apparence d'un serpent, ils ont mangé le fruit défendu. Et c'est en le mangeant "qu'ils virent qu'ils étaient nus". Cette découverte de la nudité se manifeste par les "habits" qu'ils se font avec des feuilles et par le geste de pudeur d'Eve.

Dieu, comme tous les soirs, descend leur parler mais, honteux de leur faute et de se savoir nus, ils se sont cachés. Quand Dieu les découvre, il les réprimande d'avoir désobéi. Il y a dans la réaction de l'Homme et de la Femme une certaine puérilité: Adam rejette la faute sur Eve, en haussant les épaules d'une façon de dire qu'il n'avait pas trop eu le choix. Et Eve de vite rejeter la responsabilité sur le serpent qui l'a tentée par des doux mots.

 

Une construction bi-latérale:

Sur notre gauche, les deux premiers parents se découpent sur un fond de bosquet sombre, tandis que l'autre moitié du tableau est occupé majoritairement par le ciel et sur un paysage qui disparaît dans une perspective atmosphérique.

Elève des frères Carrache, Le Dominiquin porte le même intérêt qu'eux sur la nature qui devient aussi une composante importante du tableau. Il faut noter de cette façon la netteté de la touche pour exprimer le feuillage, où chaque feuille est un élément indépendant de l'autre.

Le ciel est occupé plastique par des anges, des chérubins et le voile de Dieu le Père porté aussi par un groupe angélesque. La position plastique de Dieu dans cette peinture est intéressante: elle représente, selon moi, la frontière temporelle entre le passé et l'avenir. En effet, sous la draperie, on voit ce paysage qui représente le jardin d'Eden, et en premier plan, un cheval, un lion et un agneau. Nous pourrions développer des pages entières sur la signification symbolique de ces trois animaux, mais pour rester simple, on peut dire tout premièrement qu'ils représentent le monde animal. En créant Adam, il lui a donné le rôle de régner sur le monde animal et végétal. Adam et les animaux vivaient en parfaite harmonie et il leur avait donné un nom. Le paysage pastoral appuie cet idéal d'harmonie et de passibilité. C'est le temps édenique révolu.

 

Des doigts tendus:

Or la faute est commise. Dieu a levé un doigt plein de colère sur les deux fautifs. Et si on se penche sur ce geste, on remarque que beaucoup des protagonistes de ce tableau fond des gestes et tendent le doigt.

On a déjà vu qu'Adam et Eve désignaient le coupable respectif d'un doigt accusateur. Et Dieu lève vers le ciel le doigt du châtiment: l'Homme et la Femme perdront leur immortalité, il connaîtra la peine et la sueur du travail, et elle souffrira en mettant au monde l'enfant.

Les deux anges qui surplombent le groupe divin font aussi ce geste. L'un, inquiet montre la scène à l'autre: il représente le présent, le péché originel dans son fait accompli. Mais le deuxième lui répond en posant son doigt sur la bouche: le futur amènera des jours meilleurs, à savoir la Rédemption par le Fils de l'Homme, soit Jésus-Christ.

 

L'emprunt à Michel-Ange:

On ne peut voir ce tableau sans tout de suite penser à La Création d'Adam de Michel-Ange. Le Dominiquin se sert de cette citation pour rendre hommage à celui considéré comme le plus grand peintre de tous les temps. Il a repris le drapé, la position des personnages du groupe, à quelques détails près. Celui qu'on retiendra est la substitution d'Eve, qui se trouvait sous le bras du Père, par un globe terrestre. Dieu veille sur l'humanité, et cette main posée avec bienveillance sur la Terre est, tout comme le doigt posé sur les lèvres de l'ange, un indice de la promesse du Messie. La promesse d'une harmonie qui reviendra: le lion couché près de l'agneau rappelle les paroles d'Isaïe (XI, 6).surveillance divine

c'est pas moi

jeunes recrues en formation

Eve accuse le serpent

les zélés

Petite conclusion

Ainsi, on peut voir d'un oeil rapide un message que le peintre a voulu faire passer simplement, à l'opposition du courant maniériste qui le précédait. C'est un hommage à l'oeuvre michélangélesque mais aussi une affirmation, par les coloris plus vifs et une nouvelle approche de la nature, d'une nouvelle approche de la peinture.

 

Credits photographiques: les images sont prêtées avec l'aimable permission du blog latartine

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Date de dernière mise à jour : 25/11/2020

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